Le procédé à la gomme bichromatée est une technique basée sur la photosensiblité du bichromate de potassium mélangé à de la gomme arabique. Il fait partie des techniques « pigmentaires » de la photographie, dans lesquelles l’élément photosensible est le liant de l'image et non ses composants.
PROCÉDÉ À LA GOMME BICHROMATÉE
Charles Jacquin, L’abreuvoir de Javel, juin 1903
© Collection Petit Palais, Musée des Beaux-arts de la Ville de Paris
PÉRIODE HISTORIQUE DE PRODUCTION ET D’UTILISATION
A la suite des travaux d’Alphonse Poitevin et de sa découverte des techniques pigmentaires, le procédé à la gomme bichromatée est proposé en 1858 par le photographe anglais John Pouncy. Le procédé, qui ne permettait pas d’obtenir une définition très élevée, ne rencontra qu’un succès limité et tomba dans l’oubli. Il resurgit à la fin du xixème siècle dans le contexte de la photographie pictorialiste, avant de décliner à nouveau à partir de l’année 1914.
L’aspect vaporeux et texturé de ces épreuves ainsi que la possibilité d’intervention manuelle du photographe ont attiré les artistes du courant pictorialiste : Demachy (1896), Puyo, Steichen, Stieglitz, etc. Ce dernier a créé des effets particuliers en mêlant la technique de la gomme bichromatée à celle du cyanotype ou du platinotype. Plus récemment, le procédé connaît un regain d’intérêt chez les photographes contemporains adeptes des techniques alternatives tels que Nancy Wilson-Pajic ou Sally Mann. Aujourd’hui ce procédé est très difficilement praticable en Europe suite à l’interdiction par la communauté européenne de la vente du bichromate de potassium, classé comme substance hautement toxique et polluante.
FABRICATION
Le photographe choisit son papier en fonction de sa texture, il l’enduit au pinceau avec un mélange de gomme arabique pigmentée et de bichromate de potassium. Après séchage, le papier est mis en contact avec un négatif dans un châssis-presse. Les clairs du négatif laissent passer la lumière qui vient durcir la gélatine bichromatée, les zones non insolées restant tendres. Le papier est ensuite lavé (ou dépouillé) à l’eau chaude, qui solubilise et élimine la gomme et le pigment en proportion inverse de l’insolation. Le photographe peut accentuer ou retenir localement le dépouillement, intervenant directement et au pinceau dans la formation de l’image. La feuille est ensuite mise à sécher. Selon l’effet désiré plusieurs passages sont souvent nécessaires. Il faut donc réitérer les différentes étapes jusqu’à satisfaction. Une fois le rendu définitif obtenu, la feuille est plongée dans un bain de bisulfite de sodium qui permet d’éliminer les résidus de bichromate (clarification), puis à nouveau rincée à l’eau et séchée. Il est possible de réaliser des images en bi, tri voire quadrichromie en appliquant successivement plusieurs couches pigmentées.
ALTÉRATION ET CONSERVATION
Le pigment, composant de l’image, étant typiquement stable, le procédé à la gomme bichromatée jouit d’une excellente stabilité, à l’instar des autres techniques photographiques pigmentaires.
Glossaire visuel des procédés photographiques © ARCP / Mairie de Paris, 2023